Ceci est une gigantesque mascarade, que je m'en vais dénoncer de ce pas. Ce même si à l'heure où j'écris ces lignes, je mets ma vie en danger, en même temps que mes bijoux de famille, pour vous livrer le secret le mieux détenu de l'univers : pourquoi le Grog, le jdr, l'univers, et le reste ? Pour le reste, j'ai encore un doute, et je continue mes expériences ésotériques sur le sujet. Cela dit, je peux déjà vous livrer mes découvertes pour le reste. Enfin, pour le principal. Bref, j'me comprends.
L'univers déjà, a été créé pour moi par une belle journée d'été, alors que j'étais haut comme trois pommes (ce que c'est d'avoir grandi bercé par les musiques de dessins animés pourraves). Je passais mes vacances d'été dans un village du sud de la France. J'y étais un pur produit de l'air toxique parisien balancé dans un monde étrange où les arbres font "ksss ksss ksss" (on m'apprit plus tard qu'il s'agissait d'un virus nommé cigales) et où on voit le fond des rivières (l'angoisse). C'est là qu'un jour, on me fit jouer à l'Oeil Noir. J'ai un souvenir assez vague de ces premières parties. Il faut dire qu'à cet âge là (trois pommes = 7 ans), je servais plutôt de chair à canon et à lancer les dés à mes comparses plus âgés. Loin de sombrer dans la dépression suite aux divers outrages qu'on peut faire subir à un gobelin de cet âge-là en lui apprenant ce qu'est un dé à vingt faces (et oui, déjà), je décidais de faire "comme les grands". L'ambition était née, dévoreuse d'âme qui allait me mener jusqu'en haut de l'affiche (je m'voyais déjà...). Hrm, je m'égare. Les livres dont vous êtes le héros ont envahi ma vie, tels les aliens de Mars Attacks. Je ne devais jamais m'en relever. Un peu plus tard, à trois pommes et demi environ, j'achetais par un malheureux hasard l'Oeil Noir, la grosse boîte de Gallimard. Ce que c'est d'avoir les yeux plus gros que le ventre... Et voilà le but de l'univers : que j'achète, par un beau printemps de 1987, la boîte d'initiation de l'Oeil Noir.
Mais il me restait encore à découvrir le but du jdr. Pour cela, j'arpentais tout d'abord l'Aventurie en long, en large, et surtout en travers, dans la cour du bahut (les puristes excuseront le manque de véracité historique, il est peu probable que j'aie jamais appelé l'école primaire "bahut"). De là, je découvris Star Wars, puis Warhammer, puis AD&D, puis plein d'autres. Collège et lycée furent des années heureuses, passées loin des considérations plus terre à terre de mes contemporains, dans un monde de rêves et d'évasion (comprendre : les nanas, c'était pas encore ça). Nous avions quitté Paris depuis belle lurette, optant pour une petite maison en bord de Méditerrannée, du côté de Sète. C'était, comme l'avait dit le poète, "juste au bord de la mer à deux pas des flots bleus". C'est d'ailleurs pour ça que je passais mes samedi soir enfermés dans mon garage avec les potes. J'y fis même un détour par Magic ou les jeux de figurines. Mon bac S en poche, je décidais tout de même de quitter mes parents et de repartir vers le nord, plus précisément vers une sordide école d'ingénieur située à Lyon. Désemparé par l'architecture métallo-ambigüe des lieux, quasiment new age, je décidai de me plonger à corps perdu dans une association de gens comme moi (comprendre : des geeks rôlistes). Là, je passais à l'étape supérieure, enchaînant parfois trois ou quatre parties par semaine en parallèle à des campagnes au rythme soutenu : Nephilim, Earthdawn, Trinity, la mythique Dragonlance, et quelques autres encore. Je m'impliquais aussi dans l'organisation de la manifestation du club, ce qui me permit d'avoir un premier contact avec certaines personnes du "milieu" comme Sébastien Célerin ou Julien Blondel. A l'époque, jeune et innocent, je ne savais pas encore qu'il y avait un "milieu" du jdr. Cela dit même aujourd'hui, j'en doute. Enfin, je traînais mes guêtres sur le forum Casus de l'époque, un truc jaune immonde en hypernews où traînaient aussi des gens étranges (dont un certain Coredump, que nous reverrons plus tard). Mon diplôme d'ingé en informatique sur le coeur (hrm), je m'installai dans une petite vie tranquille et sans histoire, toujours à Lyon. Le jdr devenait peu à peu une occupation annexe, bien loin de mes priorités du moment : ma compagne de l'époque, son chat et les sorties au resto avec les potes. Dans un moment d'égarement, je m'inscrivai comme rameur au Grog, jurant mes grands dieux que je ferai rapidement les fiches pour Polaris et Pendragon. Très longtemps, je n'ai fait aucune fiche ni pour l'un, ni pour l'autre. Mais j'ai trouvé le pourquoi du jdr : m'inscrire au Grog.
J'étais une ombre parmi les rameurs pendant un peu plus d'un an. Ce n'est que plus tard, dans une phase de non activité chronique (ils appellent ça l'inter-contrat), que je me mis à faire des fiches pour le Grog. Et je commençais par mon péché mignon : Dragonlance. En un mois, j'avais fiché une quinzaine de modules, et tout le monde semblait avoir oublié mes promesses de fiches Polaris et Pendragon (ouf). En janvier 2003, mû par une intuition toute masculine, j'acceptais de devenir un élu, un surêtre dopé à coup de margarita frozen et de cookies au chocolat. Un "admin". Je rencontrais alors entre autres admins Aldo, Philippe, Kédrik ou encore Rémi. Je pris alors pied dans le "milieu", et mine de rien, j'ai un gros pied. Quelques coups de chance et de pouce plus tard, j'aidais Jérôme Vessière pour la traduction du setting d20 Dragonlance (comprendre : il a traduit le bouquin et moi quelques dizaines de mots), ce qui m'amena tout naturellement à aider l'éditeur Black Book dans sa traduction du setting Midnight. Les plus perspicaces auront remarqué que je n'ai aucune expérience apparente et encore moins de diplôme d'anglais, mais ne leur dites pas, ils ne semblent pas avoir remarqué... Je fis aussi quelques piges dans Casus, piquant quelques milliers de signes à Arnaud Cuidet, Vincent Kaufmann ou Didier Guiserix, avec leur aimable autorisation. Puis je bossais ponctuellement sur des gammes comme Vermine ou encore Mousquetaires de l'Ombre. Le tout en poursuivant en parallèle ma carrière, bien moins prolifique ludiquement parlant, mais bien plus rémunératrice, d'ingénieur. Et tout cela m'amèna à comprendre, enfin, le but même de l'existence du Grog. Son essence profonde. Sa seule et unique raison d'être. La justification du jdr, de l'univers, et sans doute du reste. Que les amateurs dans mon genre puissent écrire et mettre en ligne leur bio, à côté des plus dignes représentants du star system du jdr.
Ca en jette, hein ?
Addendum : aujourd'hui (février 2010), quelques années plus tard, j'ai repris quelques distances avec le monde du jdr, en même temps qu'avec Lyon, puisque je vis à Montréal, où je découvre les joies du rôlisme nord-américain, de la poutine et de la Molson Ex (un intrus s'est glissé dans ces trois propositions). Suite aux turbulences qu'a connues le Grog en 2008, j'ai participé au développement de sa v2 au sein de l'équipe de développement. Après quelques mois assez intenses répartis entre tâches de développement et tâches d'administration, et une fois que les nouveaux moteurs ont semblé ronronner sans trop de hoquets, j'ai fini par quitter mon rôle d'administrateur à l'automne 2009, mettant ainsi fin à plus de six ans de bons et loyaux services. Six ans de boulot, de galères ou de prises de becs parfois, mais aussi six ans de découvertes, d'amitiés et de franches rigolades. Tourner ce genre de page n'est jamais facile, mais j'avais envie que le jeu de rôle redevienne ce qu'il fut autrefois pour moi : un jeu, et un loisir.
Cette bio a été rédigée entre le 8 mai 2000 et le 8 mai 2009. Dernière mise à jour le 3 octobre 2010.