Michael Kaluta est un très chouette garçon et un formidable dessinateur. Il est né en 1947 au Guatémala (de citoyens américains) et a passé son enfance dans une série de bases de l'Air Force, principalement dans l'est des Etats-Unis.
Il fut influencé au début de l'adolescence par Roy Krenkel et Frank Frazetta. Leurs dessins des rééditions chez Ace des nouvelles de Edgar Rice Burroughs, ainsi que les nouvelles elles-mêmes, a instillé en lui une fascination du fantastique qui est évidente dans tout ce qu'il dessine. Quelques-uns des premiers dessins publiés de Kaluta le furent dans Graphic Showcase, un magazine de fans en 1967. Intitulé Eyes of Mars, c'était un hommage manifeste à John Carter, le célèbre aventurier de Mars de Burroughs.
Revenons aux années 60, où les fans de comics publiaient des dizaines, si ce c'était des centaines, de fanzines. De jeunes dessinateurs qui auraient pu illustrer des comics dans un marché plus ouvert étaient rélégués à l'apprentissage de leur art dans ces magazines. Chaque sous-culture a sa propre hiérarchie, et le monde des fanzines et des dessinateurs de fanzines n'est pas différent. Les "meilleurs" d'entre eux étaient imprimés via offset photo, et avaient des tirages dans la fourchette des 2-3000 exemplaires. Quelques-uns étaient des "artzines", et leurs éditeurs prenaient soin d'avoir des contributions des pareils à Jeffrey Jones, Bernie Wrightson, et Michael Wm. Kaluta.
Les trois jeunes "enfants terribles" du fanzinat des comics se rencontrèrent à une convention en 1967. L'année suivante le marché des comics ouvra ses portes aux nouveaux venus pour la première fois en quinze ans. En 1969, Kaluta eut son premier contrat professionnel. C'était chez Charlton, un éditeur de comics de seconde zone. Il fit même quelques bandes rudimentaires dans des numéros de 1969 de ce bastion de la contre-culture hippie, The Gothic Blimp Works. Mais il ne lui fallut pas longtemps avant de faire des histoires courtes pour DC Comics - l'une des deux grandes compagnies de comics.
Michael monta rapidement les rangs de la nouvelle génération de dessinateurs de comics. En 1972 il illustrait les aventures de Carson Napier, plus connu des aficionados d'Edgar Rice Burroughs sous le nom de Carson de Venus. L'année suivante il commença à poser sa griffe sur la courte série de The Shadow, également pour DC Comics.
The Shadow était un personnage pulp de la radio des années 30 et 40. Il était célèbre pour son rire étrange, sa capacité à "masquer l'esprit" des simples mortels, et pour la question "Qui sait quel mal réside dans le coeur des gens ?". L'interprétation de Kaluta était à la fois mystérieuse et sinistre, et c'est dans cette courte série de cinq numéros et une paire de couvertures que les prémisses de son style mature allaient faire surface.
Les échos traînants des vieux magazines pulp furent les abrégés de science-fiction comme Amazing et Fantastic. Pour beaucoup de dessinateurs de l'époque, ils fournissaient un débouché pour des dessins au crayon ou à l'encre qui étaient vite faits. La couverture couleur occasionnelle met en évidence le développement du style de Michael au début des années 70.
Il perfectionna ce style au milieu des années 70, lorsqu'il explora le marché alors en dévelopement des impressions en série limitée et des portfolios. L'un de ses premiers essais dans la peinture se fit chez Christopher Enterprises, dans le portfolio de 1975 Dante's Inferno. Sur les huit planches, deux montrent une orientation que Kaluta suivra pour en fin de compte la revendiquer pour sienne. Globalement symétrique et comportant des tourbillons sensuels curvilinéaires d'Art Nouveau, cette combinaison de lignes de force et de terroir allait devenir sa marque de fabrique.
Il y eut d'autres débouchés en dehors du domaine limité des comics, ce furent les livres illustrés qui firent une courte réapparition, particulièrement les éditions illustrées des histoires de Robert E. Howard. The Lost Valley of Iskander et The Swords of Shahrazar furent deux des entrées de Kaluta dans ce marché en expansion en 1974 et 1975. Il peignit aussi la jaquette de The Shudder Pulps en 1975. Il fit même équipe avec son idole d'enfance, Roy Krenkel, sur des illustrations pour un livre de poche DAW de 1975 de Lin Carter, As The Green Star Rises, ce qui a dû être quelque chose.
En 1976, il loua un studio dans la ville de New York avec Jones, Wrightson, et un jeune dessinateur de comic anglais qui s'appelait Barry Smith. Barry ajouta rapidement le noble "Windsor" à son nom, et on le connaît depuis sous le nom de Barry Windsor-Smith. On a débattu de l'impact de The Studio sur chacun de ces dessinateurs pendant des années. Il n'a duré que quatre ans et il produisit, en 1979, un registre documentaire sous la forme d'un livre simplement intitulé The Studio. Les dessins et le style de Michael prirent forme à ce moment. Avec un marché de l'édition prêt à avaler tout ce qu'il pouvait faire, il fut livré à lui-même pour développer sa discipline artistique et ses compétences en dessin et peinture.
Des compositions élégantes, romantiques et exotiques furent tirées de son cerveau alors qu'il s'efforçait de dépeindre les images qu'il pouvait concevoir là-bas. Comme "Solo", en 1977, le concept demande clarification alors que la composition guide nos yeux vers chaque détail minutieusement rendu. D'autres impressions énigmatiques de l'époque du Studio furent "Why he doesn't sleep at night", "She's leaving home", "Behind Neptune's throne", "Icarus had a sister", et le fascinant "Intolerance", juste imprimé sur tirage photo en 100 exemplaires.
En 1978, Kaluta fut l'un des dessinateurs décrit dans Dream Makers, un livre de Paper Tiger consacré aux lieux de travail et aux styles de six dessinateurs de fantastique.
Pour un temps, les éléments circulaires dominèrent dans ses compositions. Les quatre planches de son portfolio de 1979 Children of the Twilight étaient structurées autour d'un motif circulaire, de même pour les planches à l'encre de son portfolio de 1984 Bird of Death. En fin de compte il se développa au-delà du cercle, mais son dessin garda une impression de composition précise qui ancre chaque image solidement, si bien que nous pouvons examiner tous les détails compliqués à loisir, sans perdre pied.
Heureusement pour nous, son côté elfique, cet humour à la Puck qui se perdait dans l'intolérance de morts crépusculaires, fut sauvé par sa rencontre avec l'auteur Elaine Lee. Ensemble ils élaborèrent Starstruck, un space opéra de SF sauvagement humoristique, exotique, érotique et obtus, d'abord joué sur scène en 1980 et encore en 1983. Peuplé principalement par des femmes toujours plus intriguantes comme Brucilla, Galatia 9 et Erotica Ann, il fut édité sous une éclatante forme de comic dans le magazine Heavy Metal, en commençant dans le numéro de novembre 1982. Kaluta mettait les personnages outrageux et improbables de Lee dans des mondes tapageurs, sauvages et violents qu'il était impossible de créer sur scène. Starstruck prit vite une nouvelle vie en tant que comic.
Le style mature de Kaluta fait ses débuts dans une série de nouvelles pour adolescentes de 1987. Il y eut quatre numéros dans la série My Name is Paris et ils prirent place au tournant du 20ème siècle. Prenant son inspiration dans le mouvement de l'époque, l'Art Nouveau, Michael combina la composition, la symétrie, les cercles et les lignes sensuelles de son crayon en une approche cohérente qui serait son approche artistique pendant des années.
Ses dessins de comic dans les années 80 étaient avant tout des couvertures, bien qu'il fit au crayon une nouvelle graphique de Shadow en 1988. Quoique Hitler's Astrologer soit de l'excellent travail, les encrages du grand des comics Russ Heath privèrent d'un peu de tension les lignes de Kaluta et donnèrent un grand comic quant à l'histoire mais moins que satisfaisant du côté de Kaluta.
Quand on recherche le chef-d'oeuvre de Kaluta, une grande attention doit être portée à l'incroyable édition illustrée de 1988 de Metropolis de Thea von Harbou. Non une adaptation au comic, mais un véritable livre illustré dans le sens classique du terme, il a des planches en couleurs et bichromiques, plus des illustrations saisissantes des têtes de chapitre, couvre-livre et page de garde. Fusionnant son style d'Art Nouveau avec une conception d'Art Deco qui sied bien au projet, Metropolis fut écrit par l'épouse de Fritz Lang qui matérialisa la vision sur grand écran muet en 1927. L'interprétation de Kaluta est fidèle à la fois au coeur du scénario et à l'esprit du film.
D'autres projets comblèrent la décade : de nouveaux dessins Starstruck en comic, une adaptation graphique du film, The Abyss, et des illustrations pour une paire de livres. Comme beaucoup d'habiles dessinateurs, Kaluta se trouva entraîné dans la visualisation de décors et personnages pour les jeux micro et d'animation. Nombreux furent les projets qui ne virent jamais le jour et existent uniquement dans ses épais cahiers. Echoes, The Drawings of Michael William Kaluta fut récemment édité par J. David Spurlock chez Vanguard Publishing, et est à présent disponible chez Bud Plant Comic Art, ainsi que d'autres dessins de Kaluta.
Les années 90 virent l'une des plus bizarres équipes dans une série de collaborations avec Harry Harrison pour son personnage de Bill le Héros Galactique. Si chacun des quatre livres de 1991 comprenaient une section intérieure de 16 pages de beaux crayonnés de Kaluta, les couvertures étaient des rendus à l'aérographe de dessins qui présentaient moins de caractéristiques de Kaluta que dans Hitler's Astrologer. Etrange. Une autre image peu connue de Kaluta est le livre de poche de Del Rey de 1996, The Wheel of Dreams. Ses douze dessins pour le calendrier Tolkien de 1994 sont des classiques et font de cette année l'une des plus recherchées de toutes les grandes séries. Il fit encore beaucoup de couvertures de comics, dont une longue série chez DC/Vertigo pour The Books of Magic en 1996 et après, et une superbe série dans The Spectre, également pour DC.
Le chant de sirène d'Edgar Rice Burroughs fut une fois de plus entendue en 1998, lorsque Michael fut choisi pour fournir des illustrations pour le dernier récit non édité d'Edgar Rice Burroughs, Minidoka.
L'année dernière (en 2001), sa couverture pour le numéro 8 du comic The Victorian reçut le prix Spectrum Silver dans la catégorie des comics. Il continue à s'améliorer sans cesse.
Traduit d'après le site de l'auteur (où l'on trouve aussi sa bibliographie ainsi qu'une liste d'interviews), avec son aimable autorisation.
Cette bio a été rédigée entre le 8 mai 2000 et le 8 mai 2009.